François RENAULT (1758-1820) et Louise RUELLAND (1762-1825).

 

Notre ancêtre François RENAULT est né à La Malhoure, en la métairie du Grand Clos, le 2 novembre 1758. Il était un des douze enfants de Jean RENAULT et de Françoise SIMON.

 

Il a eu plusieurs frères et soeurs, dont Françoise Julienne RENAULT, née le 18 février 1756, Mathurine Jeanne RENAULT née le 18 mai 1757, Jeanne RENAULT née le 5 mars 1760, ainsi que Anne RENAUD née vers 1767, mariée à Jean BOUARD et décédée à La Malhoure le 25 novembre 1824 à l’âge de 57 ans. Un Pierre RENAULT est né le 6 avril 1780 au Grand Clos.

 

 

« Le quatrième septembre mil sept cent soixante deux a été baptisée par moi soussigné curé Louise Floriance Ruellan née de ce jour fille de Jean et de Louise Boulé son épouse. Parrain Louis Boulé et marraine Jacquemine Gaultier. Le père présent qui signe

Jan Ruellan

JM Avril, curé

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fille de Jean RUELLAND et de Louise BOULé, Louise RUELLAND est née à Maroué, près de Lamballe, le 4 septembre 1762. Ses parents ont eu d’autres enfants : Gilles Charles né le 3 juillet 1760, Renée Perrine née le 26 mars 1758.

 

Louise RUELLAND habite à Plestan au moment de son mariage, qui se déroule le 11 février 1794 [2] à La Malhoure.

 

Le couple habite à La Malhoure, à la ferme du Grand Clos.

 

François RENAULT et Louise RUELLAND ont une trentaine d’années lors de la Révolution, dont ils ont vécu les évènements locaux.

 

Révolution et chouannerie dans le Mené.

 

L’alimentation humaine repose surtout sur la culture du blé noir, que l’on transforme en pain, en galettes ou en bouillie. Le froment est moins cultivé, alors que l’avoine et le seigle conservent une place importante[3]. La pomme-de-terre, quant à elle, est pratiquement inconnue. L’agriculture, qui est conduite par les usages familiaux traditionnels, connaît des rendements souvent variables. La Convention, consciente que l’origine de la Révolution doit beaucoup aux revers de l’agriculture, crée la Commission de l’Agriculture et des Arts qui a pour mission de promouvoir dans les campagnes l’usage de techniques plus rationnelles.

 

Si la nuit du 4 août 1789 a vu l’abolition des privilèges, celle-ci n’a pas exclu le droit des propriétaires locaux de percevoir leurs rentes. La situation n’est pas comprise par la population paysanne, qui se décide ici et là à s’insurger. C’est ainsi que l’abbaye de Beaulieu, en Languédias, est envahie par plusieurs dizaines de paysans et que les livres de comptes sont brûlés. Un peu plus tard, c’est le château d’Yvignac qui est menacé. Les dragons, venus de Lamballe, interviennent pour le protéger et faire respecter les droits du Comte du Boishue. L’armée de la Révolution venant protéger un noble local pour lui permettre de conserver ses privilèges, l’incompréhension est totale. A l’issue des échauffourées du 24 janvier 1790, on comptera plusieurs morts et de nombreux blessés. C’est une première dans la région[4].

 

En 1791, c’est la promulgation du nouveau statut civil du clergé qui est à l’origine de désordres innombrables. L’obligation de prêter serment en chaire, devant les paroissiens réunis à l’office du dimanche, déclenche souvent la révolte et l’incompréhension. Le 13 février, le recteur de Plumaugat prête serment en public et sème dans son église un chaos indescriptible imposant le recours aux forces de l’ordre. Les blessés sont nombreux, y compris du côté de la Garde Nationale. L’émotion est telle que les faits seront évoqués à l’Assemblée Nationale, et sanctionnés par la justice[5].

Les recteurs acceptant de se plier à la nouvelle Constitution resteront cependant très peu nombreux, malgré les vives incitations de certains maires.

 

En 1792, la situation locale se tend de nouveau en raison de la fermeture des églises et chapelles où officient des prêtres non assermentés. Le Directoire Départemental[6]  ordonne de plus l’arrestation des ecclésiastiques qui seraient à l’origine de troubles publics.

Parallèlement, la résistance royaliste s’organise. L’Association Bretonne voit le jour, à l’initiative du Marquis de la Rouërie qui décèdera à St-Denoual, et du Comte Michel Picot de Limoëlan, originaire de Sévignac. Celui-ci sera arrêté, condamné à mort avec une partie de sa famille et guillotiné à Paris le 18 juin 1793.

En octobre de la même année, l’armée catholique et royale créée en Vendée franchit la Loire vers le nord et gagne plusieurs villes bretonnes. Après avoir conquis Dol, elle s’approche de Dinan dont la municipalité s’est réfugiée à Jugon.

 

La Terreur voit le jour en 1793. Les productions agricoles sont fortement réquisitionnées par la Convention qui tente de se donner les moyens de sa politique. Tous les paysans contribuent à l’effort d’une guerre qu’ils ne comprennent pas toujours, alors même que la récolte de cette année est particulièrement faible. Les toiles aussi sont réquisitionnées afin d’habiller les soldats d’une « République en danger », les fameux soldats de l’an II.

Les hommes eux-mêmes, peu à peu, devront se présenter à la conscription obligatoire. Les déserteurs sont nombreux, et cet esprit d’insubordination largement entretenu par une partie du clergé donne lieu à bon nombre de fouilles, de perquisitions et de mises sous séquestre des biens des personnes recherchées. Une chasse active au déserteur, particulièrement fructueuse, est organisée vers Plénée-Jugon.

Toute personne est facilement suspectée de pensée contre-révolutionnaire, tout rassemblement est interdit : la troupe intervient fréquemment à Sévignac, Lanrelas, Merdrignac, Quédillac …

 

Les jeunes gens qui ont refusé la conscription, la fameuse levée de 300 000 hommes, se regroupent ça et là et forment des bandes qui contribuent à l’effervescence locale et au développement de la chouannerie. Recherchés par les autorités, ils se cachent notamment dans les bois et les forêts : Boquen, La Hardouinais, Penguily … En mars 1794, ils attaquent à 300 le bourg de St-Meen d’où ils doivent battre en retraite. En représailles, le commandant de la place fait exécuter sept hommes à titre d’exemple : la guerre entre les Blancs et les Bleus a commencé. Dans le Mené, le chef chouan Boishardy organise ses troupes et conduit de multiples actions de harcèlement. Son fief se trouve sur le chemin qui relie Erquy au Morbihan, emprunté par les émigrés de retour d’Angleterre se rendant sur les terres chouannes du pays vannetais.

La radicalisation du régime renforce la recherche des prêtres réfractaires, et ceux d’entre eux qui sont découverts risquent l’emprisonnement dans des conditions effrayantes, ou l’échafaud.

 

Consciente des excès de la Terreur et de l’impasse dans laquelle elle conduit peu à peu tout le pays, la Convention vote le 9 thermidor an II (27 juillet 1794) le décret d’accusation de Robespierre qui est exécuté le lendemain, sans aucun procès, avec vingt-et-un des siens.

 

Cette mesure n’arrête pas l’activité des Blancs : le 16 décembre 1794, un fort groupe de chouans conduits par Boishardy investit la ville de Jugon aux cris de « Vive le Roi », désarment les habitants apeurés, se partagent des effets militaires, brûlent les registres de la municipalité puis se retranchent rapidement dans les landes du Mené[7].

 

Les chouans commettent de nombreux forfaits dans les campagnes, débusquant les prêtres « juroux » ayant prêté serment. C’est ainsi qu’ils font irruption durant la nuit du 18 décembre 1795 dans le presbytère de Trémeur pour y passer par les armes le recteur Oly après l’avoir ligoté, puis en repartent en lui volant tous ses biens[8]. Plus tard, un autre groupe attaque deux diligences entre Montauban et Quédillac. Ces faits sont innombrables.

 

A partir de 1795, la chasse aux prêtres réfractaires reprend vigoureusement alors que la plupart venaient d’être libérés. Le 6 janvier 1796, ce sont les Bleus qui enlèvent en pleine nuit le recteur de Lanrelas et l’abattent sans aucune forme de procès. Ayant toujours refusé de prêter serment, il avait pourtant été régulièrement libéré de prison peu de temps auparavant.

La population cache efficacement ses prêtres. Ainsi à Trémeur, au village du Menu Bois, les cinq sœurs de l’abbé Mégret, ancien vicaire de Caulnes, donnent asile à leur frère libéré de l’Ile de Ré, puis à d’autres prêtres libérés des pontons de Rochefort. Les sœurs Mégret sont particulièrement actives et sans doute convaincues et courageuses. Elles servent à l’occasion de boîte aux lettres aux courriers royalistes. Un dimanche, de retour de l’église vers le Menu Bois, elles croisent le maire de Trémeur qui est un patriote zélé et lui infligent une solide correction. L’affaire fait le tour de la paroisse, une chanson est composée et chantée dans tout le pays au grand dam du citoyen-maire [9]!

 

Le coup d’Etat du 18 brumaire entraîne la chute du Directoire et l’avènement de Bonaparte. La période qui suit voit un apaisement relatif des campagnes du Mené, jusqu’à l’attentat contre le Premier Consul rue St-Nicaise, en plein cœur de Paris. L’enquête de Fouché, le zélé ministre de Bonaparte, conduit rapidement à identifier les chouans derrière cette tentative d’assassinat. Conduit par Georges Cadoudal, un petit groupe de chouans bien informés a en effet fomenté cet attentat qui a failli réussir. Parmi eux, deux sont originaires du Mené : Pierre Robinault de Saint-Régent, dit Pierrot, est originaire de Lanrelas et Joseph Picot de Limoëlan, dont le père fut guillotiné pour avoir participé à la conspiration de La Rouërie, est né à Sévignac. Si le premier est arrêté et conduit à l’échafaud, le second se cache patiemment et échappe de peu à une mort certaine. Il regagnera plus tard son château de Sévignac puis quittera définitivement l’Europe pour les Etats-Unis.

 

 

Les enfants de François Renault et Louise Ruelland.

 

Malgré les maladies, la pauvreté, ces évènements tragiques et l’actualité politique difficile du pays, la vie continue tant bien que mal dans les campagnes.

 

François et Louise ont plusieurs enfants. Parmi eux, citons Jean RENAUD, notre ancêtre, né le 13 frimaire de l’an V (4 décembre 1796), qui sera laboureur à La Malhoure, Jeanne RENAUXT, née le 14 messidor de l’an VII à la métairie du Grand Clos, Françoise Simone RENAUX, né également au Grand Clos le 20 nivôse de l’an XI, François RENAUD, né vers 1801, même profession. Aucun ne saura écrire, ni même signer.

 

François RENAULT décède à La Malhoure le 18 février 1820, à minuit. Louise RUELLAND décédera à La Malhoure le 13 avril 1825



[1] Acte de baptême, paroisse de Maroué, 4 octobre 1762.

[2] Ou le 23ème jour du 5ème mois de l’an II de la République française une et indivisible, ou le 10 pluviôse.

[3] Cf. Yves-Marie ROUAT, Le pays de Broons pendant la Révolution, éd. Terroir de Broons, 1989.

[4] in Yves-Marie ROUAT, op.cité.

[5] in Yves-Marie ROUAT, op.cité.

[6] Le Directoire Départemental sera ultérieurement remplacé par le Conseil Général.

[7] in Yves-Marie ROUAT, op.cité

[8] Rapporté par M.Huet, commissaire du Directoire de Broöns, in Yves-Marie ROUAT, op.cité

[9] in Yves-Marie ROUAT, op.cité

(c) Jean-Marie Renault, 2008-2023

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