Langue bretonne

Les ancêtres bretonnants se répartissent en deux zones linguistiques distinctes : le Trégor (Bro Dreger, en breton) et le Goëlo (Bro Ouelo) pour la famille JEAN et le Bas-Léon (Bro Leon) pour la famille LE BAILL.

 

Bien que contribuant à une même langue unique, le breton, les dialectes du Trégor et du Léon diffèrent légèrement par leur accent et par une petite partie de leur vocabulaire.

 

Breton Trégorois et du Goëlo (Brezhoneg Bro Dreger ha Bro Ouelo), la langue d'origine de la famille JEAN.

 

Les ancêtres JEAN et les familles associées (VITEL, LE ROHAN, CAULET,...) étaient installés dans le Trégor et dans le Goëlo, ce dernier territoire de langue bretonne se distinguant par son rattachement à l'évêché de St-Brieuc et non à celui de Tréguier. 

La limite orientale Goëlo longe la frontière linguistique qui sépare le breton du gallo, et qui part de l'ouest de Plouha et descend vers le sud (Lanvollon, Châtelaudren jusqu'à la presqu'île de Rhuys au sud).

 

Il est souvent rapporté que les habitants des deux zones linguistiques échangeaient peu. A Lanvollon par exemple, la clientèle de certains commerces étaient soit bretonnante, soit francophone (source : Jean RENAULT).

Il est d'ailleurs remarquable d'observer que la répartition fine des localités d'origine des ascendants JEAN et des branches familiales associées (VITEL, LE ROHAN, etc.) est parfaitement incluse dans la zone bretonnante, bien que parfois très limitrophe de l'aire francophone.

 

L'accent et le lexique bretons employés dans le Goëlo sont très proches de ceux du Trégor, et ce parler est généralement assimilé au Trégorrois.

 

Les premiers mariages mixtes linguistiquement datent du début du XXème siècle : Marie Augustine JEAN (bretonnante) et Jean Baptiste RENAULT (francophone gallésant) en 1904, Anne Louise JEAN (bretonnate) et François CREHALLET (francophone) en 1908.

 

L'ensemble de la famille a parlé breton, probablement exclusivement, depuis les origines jusqu'à la fin du XIXème siècle, époque à laquelle l'usage du français s'est imposé rapidement.

 

Certaines personnes cependant ne semblent pas avoir fait un réel usage de ce dernier, continuant à s'exprimer presque exclusivement en breton. Tel a été souvent le cas des femmes âgées, peu concernées par l'école et moins mobiles économiquement que la plupart des hommes.

 

C'est ainsi que Marie Reine VITEL (1846-1920) apparaît être la dernière personne de la famille a avoir fait un usage exclusif du breton. Tout laisse à penser qu'elle n'avait jamais fait usage du français, langue dont elle ne devait maîtriser que quelques mots usuels.

 

 

Louis JEAN (1840-1910), mari de Marie Reine VITEL, maîtrisait parfaitement la langue bretonne dont il faisait un usage quotidien avec sa femme ainsi qu'avec ses voisins de Lannebert et de Liscorno. Selon Guillaume HUET rencontré en 1982, Louis JEAN achetait chaque jour le journal au bourg de Lannebert, puis le lisait à haute voix à ses voisins en le traduisant en breton au fur et à mesure de sa lecture.

 

Louis JEAN, bien que bretonnant de naissance, avait en effet appris le français à l'armée en servant dans la Marine Nationale, comme beaucoup de ses camarades.

 

Les deux dernières personnes bretonnantes de naissance et ayant appris le français à l'école primaire furent Louise JEAN et sa sœur Augustine JEAN (1877-1962), qui devinrent toutes deux institutrices.

 

Jean RENAULT se souvenait que sa mère Augustine JEAN (1877-1962) ne parlait qu'en breton à sa propre mère, alors que son statut d'institutrice l'aurait conduite naturellement à lui préférer la langue française.

 

De même, elle fredonnait des chansons bretonnes telle que Mari ar Mason a Bempoull Ouelo (Marie Masson de Paimpol en Goëlo) et connaissait les paroles du cantique Itron Vari Liskorno (N.D. de Liscorno).

 

Un jour de visite familiale au Mont-St-Michel, Augustine JEAN fût excédée par les bavardages d'une visiteuse située derrière elle. Se retournant brutalement, elle lui lâcha : "Serr da c'henou, Mari Strakell" (prononcer : Zerr da hinou, Maï Strak'l), que l'on peut traduire par "Ferme ton bec, pie bavarde".

 

C'est l'écoute du breton parlé par sa mère à sa grand-mère et à d'autres personnes originaires de Lannebert qui suscita l'envie chez Jean RENAULT (1908-1978) d'apprendre la langue bretonne.

 

C'est ainsi que ce dernier, résidant alors à Paris, s'inscrivit dans les années 1930 à Skol Ober (cours de breton par correspondance) et adhéra à Kêr Vreiz, foyer associatif qui proposait dans le quartier de Montparnasse des activités culturelles et linguistiques en langue bretonne.

 

 

Breton Léonard (Brezhoneg Bro Leon), la langue de la famille LE BAILL.

 

L'ensemble des ancêtres de la famille LE BAILL et des familles associées est originaire du Bas-Léon, territoire alors entièrement bretonnant correspondant à la partie la plus occidentale de l'ancien évêché de St-Pol-de-Léon et approximativement à la partie ouest de l'actuel "Nord-Finistère", sans le territoire oriental de Morlaix situé en Trégor.

 

Ces familles firent usage presque exclusivement du breton jusqu'à la fin du XIXème siècle, pour les raisons évoquées plus haut.

 

La langue française fut introduite plus précocement que dans le Trégor et le Goëlo (famille JEAN) en raison de la proximité de la ville de Brest et de l'importance de la Marine militaire.

 

C'est ainsi que Jean Marie LE BAILL (1855-1932), élevé en breton durant son enfance à Plougonvelin, apprit progressivement le français au contact des commerçants, des propriétaires et clients de l'hôtel Beauséjour du Conquet où il était initialement jardinier, puis surtout après son départ volontaire dans la Marine en 1876 à l'âge de 21 ans.

 

Le breton resta cependant la langue quotidienne à la maison, et il semble que Jean Marie LE BAILL  échangea principalement, sinon uniquement, dans cette langue avec sa femme Jeanne COATANEA.

 

Ces parents n'enseignèrent toutefois pas le breton à leur fils François LE BAILL (1880-1943), qui semble n'en avoir jamais fait usage en dehors de quelques formules répandues, souvent mélangées au parler de Brest. L'ascension sociale de la famille nécessitait en effet l'usage quasi exclusif du français.

 

Sa propre fille Marie LE BAILL (1918-2009) n'aurait pas eu de raison particulière d'apprendre le breton, sans sa rencontre avec Jean RENAULT et son adhésion au foyer Kêr Vreiz à la fin des années 1930. C'est ainsi qu'elle apprit les bases de cette langue par Skol Ober (cours de breton par correspondance) et obtint le Trec'h Kentañ, diplôme de premier niveau.

Elle ne devait toutefois pas maîtriser suffisamment cette langue pour en faire un réel usage.

 

 

Mise à jour : décembre 2020

(c) Jean-Marie Renault, 2008-2023

Reproduction interdite sans l'autorisation de l'auteur.